Maubeuge les 20, 21 et 22 septembre 2000
par Richard Denner
« Le savoir ne peut pas se passer de la beauté. Je
cherche une science belle. » « À partir d'un certain âge de son histoire, la science doit répondre de son visage, de la beauté qu'elle présente et produit. » Michel Serres*, Les cinq sens, p 133. |
En septembre 2000, la ville de Maubeuge a accueilli un colloque sur le thème :
« Comment les Arts peuvent-ils venir en aide à l'enseignement des Mathématiques ? »
Laissons à Claude-Paul Bruter** (professeur à lUniversité Paris 12 et initiateur du projet ARPAM***) le soin de présenter les objectifs du Colloque(1):
« Lobjectif central du Colloque est de nature pédagogique. De manière subtile, il voudrait concerner la formation de lesprit. De façon plus apparente, il tourne autour de la transmission et de lacquisition des connaissances à travers des représentations visuelles, quelles soient statiques comme la peinture, la sculpture ou larchitecture ou bien plus dynamiques, comme les animations audio-visuelles, la qualité de ces représentations étant soutenue par les ressources de lart musical et de lart littéraire. »
Permettre à chacun de se forger sa propre idée en faisant la synthèse des faits qui mont le plus marqués en tant que professeur de collège tel est le but de cet article qui contient un nombre important de liens Internet.
La recherche dapproches pédagogiques nouvelles qui faciliteraient lapprentissage et lassimilation en constitue la toile de fond.
1. Regard sur le colloque au travers de lenseignement en classes de collège.
De tout temps, la réalisation de belles figures a fasciné les géomètres. Les dessins que lon découvre dans les cavernes préhistoriques(2) continuent dexercer un attrait mystérieux sur lhomme contemporain qui dispose des ordinateurs(3) les plus performants pour visualiser les objets de ses études. Pourtant, au moment où lon détient les moyens technologiques les plus avancés, les conditions denseignement deviennent plus difficiles.
Au niveau du collège, les professeurs sont amenés à accueillir des élèves dont les profils sont de plus en plus variés. Il sagit non seulement de transmettre des connaissances mais surtout, de développer des compétences et des attitudes qui permettent lapprentissage.
La géométrie offre une approche intéressante des mathématiques [1] : de part les constructions quelle permet de faire, elle suscite lattrait et provoque le questionnement. Bien plus que cela par ailleurs, avec l'arithmétique, elle en constitue l'un des deux chapitres fondamentaux.
Quand les jeunes élèves commencent à faire leurs premiers tracés avec la règle et léquerre, ils peuvent être sensibilisés à l'esthétiques des courbes mathématiques. La construction de paraboles, dellipses voire dhyperboles comme enveloppes de leurs tangentes est à la portée dun collégien. En traçant des traits droits, ils ont la surprise de voir apparaître des courbes connues depuis lantiquité grecque.
Parabole et ellipse
En agissant avec leurs mains, les élèves peuvent se confronter avec les difficultés de la figure quils sont en train de dessiner ; les questions surgissent naturellement, la matière résiste. Quand ils aboutissent, ils éprouvent un réel plaisir et peuvent dévoiler leur travail aux regards des autres. Cette démarche ne ressemble-t-elle pas à celle de lartiste ? Pour vous en convaincre, découvrez les magnifiques sculptures symboliques John Robinson(4) et toute la beauté quelles dégagent.
Un autre domaine qui fascine les enfants est celui de la construction de polyèdres ; quand pour la première fois ils fabriquent un solide en partant de son patron, cest toujours avec étonnement quils le voient prendre forme entre leurs doigts. Les adultes également sont séduits par la vue des polyèdres. George W.Hart(5), sculpteur américain en a fait sa passion, son site Internet est dune très grande richesse. On y découvre de nouveaux polyèdres ainsi que de multiples façons, parfois inattendues, de les assembler.
Il y a quelques années, les bracelets brésiliens étaient à la mode. En réalité, lusage des nuds et des cordages remonte à la préhistoire. Comme la montré Ronnie Brown(6), il est possible de les utiliser dans lenseignement en faisant lanalogie entre la théorie des nuds et lalgèbre.
Les bulles de savons(7) cachent également plus de mathématiques quon pourrait le penser. Isolées, elles sont des sphères parfaites. Quand elles sassemblent par deux, trois ou plusieurs elles révèlent le monde des surfaces minimales. Dans sa vidéo « Touching Soap Films (8)», Konrad Polthier(9) nous invite à les découvrir. En 1760, Lagrange posa le premier le problème : étant donné un bord de forme quelconque, existe-il une surface daire minimale sappuyant sur ce bord ? Une boucle quelconque en fil de fer plongée dans de leau savonneuse, fera immédiatement apparaître la solution. Une description de ce phénomène est donnée par Nathaniel Friedman(10) qui montre, à la manière de Spivak dans le volume IV de son traité de géométrie différentielle, comment on peut ainsi générer un ruban de Möbius.
Larchitecture, avec la construction de toitures qui soient les plus légères possibles, en est un domaine dapplication privilégié. Un exemple typique est la construction du stade olympique de Munich.
La visualisation des surfaces et des solides est rendue très conviviale à laide du logiciel JavaView(11) mis au point à lUniversité Technique de Berlin, il peut être téléchargé par Internet. Il est également possible de consulter et de soumettre des modèles sur le site Electronic Geometry Models(12).
Le thème des pavages nest pas nouveau dans les classes de collège. En étalant le travail sur une durée suffisamment longue, il est possible que les élèves conçoivent leur propre chef duvre en utilisant par exemple la technique de lenveloppe [2]. Mike Field(13) utilise des ordinateurs pour créer des pavages, non pas de manière statique, mais, c'est nouveau par rapport aux méthodes anciennes, en utilisant des systèmes dynamiques présentant des symétries.
Il révèle des motifs fascinants qui provoquent ladmiration, encouragent lobservateur à développer ses propres capacités et l'incite à rechercher des idées nouvelles.
Une
autre source dinspiration est lart arabe(14). En pénétrant avec Antonio F. Costa(15) dans les murs de lAlhambra de Grenade(16)on y découvre mille
merveilles, notamment les pavages(17) du plan qui sont autant de
chefs duvre de finesse et d'ingéniosité.
Jai retenu en particulier un exemple qui me semble réalisable par des élèves de cinquième. Les premières réalisations furent encourageantes. On reconnaîtra aisément la construction du motif de base ci-contre à partir des quatre triangles équilatéraux.
La piste suivie par Maria Dedo'(18) est très intéressante car elle met facilement en contact avec la théorie des groupes. Elle utilise des miroirs(19) pour visualiser des pavages et des polyèdres. Le motif de base, par réflexion dans trois miroirs, remplit tout le plan ou permet de visualiser un polyèdre dans lespace comme on a pu le voir lors de la récente exposition « Math.u-vu ? »(20) organisée par lIrem de Strasbourg.
Dans sa vidéo « The Optiverse » John Sullivan(21) a présenté sa dernière version du retournement de la sphère(22).
De magnifiques images qui suscitent limagination ! La sphère se déforme sans se déchirer, sa surface se traverse elle-même, sa face interne et sa face externe apparaissent en même temps à celui qui suit la déformation. Le tout passe par une étape centrale puis un chemin semblable conduit à la sphère retournée.
Quelle belle invitation à dépasser ses propres limites !
Les tableaux faits avec des fils tendus entre des clous sont bien connus ; leur attrait provient des courbes dont larrangement permet de produire les motifs les plus variés.
Les mathématiciens utilisent des méthodes analogues pour engendrer des surfaces. Les surfaces réglées en sont un exemple typique, elles sont générées par des droites. On peut les matérialiser en assemblant des segments métalliques comme le fait Philippe Charbonneau(23) pour construire des surfaces réglées du troisième degré dont laspect esthétique retient le regard et fascine. Il en est de même des tracés pendulaires obtenus par lartiste et qui se situent dans le sillage des entrelacs [3] dont lorigine remonte à la préhistoire.
Une autre méthode permettant de visualiser les surfaces réglées consiste à tendre du fil à coudre entre deux plaques parallèles comme la expliqué François Apéry(24) au cours de son intervention. Il utilise également des ellipses en fil de fer pour visualiser des surfaces et en particulier son modèle central du retournement de la sphère. Il a soigneusement expliqué comment on fabriquait ce genre de modèles qui demandent précision et minutie.
Au cours dun des ateliers, jai présenté mon diaporama sur le retournement du cuboctaèdre. Il illustre les principales étapes de la déformation et permet de comprendre les transformations qui se succèdent à lintérieur des modèles construits en carton bicolore et en plastique transparent.
Prises au téléobjectif et en lumière artificielle, ces diapositives complètent mon article paru dans L'Ouvert n°94(25) et n°95(26). Lensemble des modèles était également exposé ; John Sullivan en a pris quelques photos(27) visibles sur une des ses pages Web.
Une des séquences de « The Optiverse » illustre la version du retournement du cuboctaèdre(28) réalisée par François Apéry en 1992. Elle se résume en une simple interpolation linéaire entre le modèle central et le modèle de départ. (F. Apéry, G. Francis, C. Hartman and G. Chappell, University of Illinois at Urbana-Champaign.)
Je terminerai ici cette première partie en citant les travaux du graveur sur cuivre Patrice Jeener(29) avec qui je me suis longtemps entretenu. Il a également été passionné par la bouteille de Klein et la surface de Boy dont il a fait de magnifiques lithographies. Sa triple bouteille unilatère est particulièrement remarquable. Certaines de ses images ont donné lieu à des animations sur ordinateur réalisées par Jean-François Colonna(30).
2. Lenseignement des mathématiques a-t-il besoin de lapport de lart ?
Les brochures de lAPMEP(31) font depuis longtemps une large part à lactivité de lélève. On pourrait penser au premier abord que ce côté « artistique » soit inutile voire superflu. Comme le souligne Xah Lee(32), mathématicien américain, ladmiration dune belle image fractale napprend rien sur les mathématiques sous-jacentes ! En parcourant le site quil a indiqué, on découvrira de multiples aspects de lactivité mathématique. La recherche de problèmes en fait leur essence même.
Dans une brochure éditée par lIrem de Reims en 1986 [4], Michèle et André Arsène recherchent des applications de luvre de Jean Piaget à lenseignement au collège. Je nen citerai que quelques extraits dus à Piaget lui-même :
« Lenfant retient ce quil a compris et non pas ce quil a vu, et ce nest pas si naturel quon pourrait le penser. » p 92
« Laction propre donne de meilleurs résultats que la perception et lapprentissage dans lordre action -----> perception réussit mieux que dans lordre perception -----> action. » p 92
« la représentation ne remplace vraiment laction quaprès avoir été suffisamment informée par laction elle-même, et lon ne saurait ainsi, sans une coupure artificielle, la détacher de son contexte actif, pas plus que lon ne peut dissocier une perception de son contexte sensori-moteur. » p.61
« Il ny a de progrès pour nul écolier au monde, ni en ce quil entend, ni en ce quil voit, mais seulement en ce quil fait ». Alain. p 96
« En un mot, dès quil sagit de la parole ou denseignement verbal, on part du postulat implicite que cette transmission éducative fournit à lenfant les instruments comme tels de lassimilation, en même temps que les connaissances à assimiler, en oubliant que de tels instruments ne peuvent sacquérir que par une activité interne et que toute assimilation est une restructuration ou une réinvention. » p 91
« Cest précisément parce que ces connaissances sont tirées des actions et non pas des objets comme tels quelles peuvent dans la suite être traduites en opérations symboliques et en langage. » p 73
Parlant de lapprentissage, les auteurs notent que : « toute la difficulté est de trouver des activités qui permettront aux élèves de mettre en place leurs propres structures logiques, petit à petit, dès la classe de 6ème, en les faisant agir sur des objets géométriques par exemple, mais surtout sans vouloir formaliser trop vite ». p 36
Il me semble que ces quelques phrases peuvent servir de repères dans la recherche daméliorations des pratiques pédagogiques. Quel peut alors être le rôle des arts ?
Cest la multiplicité des profils des élèves qui peut amener à diversifier les modes dapproches. De plus en plus on rencontre des jeunes qui traversent des moments difficiles, les situations quils vivent parfois ne favorisent pas leur parcours scolaire et souvent les empêchent de fixer leur attention. Comment prendre en compte cette instabilité ? Une simple activité intellectuelle peut-elle la contrebalancer ? Les mathématiques peuvent-elles leur laisser une impression qui ne soit pas forcément synonyme déchec ?
Une des critiques formulées par David Cohen dans [5] à lencontre de Piaget est de négliger laspect affectif et linfluence de la société sur lévolution de lenfant. Or actuellement, les comportements des jeunes semblent dire quils ne sont pas négligeables.
Les images que lon a pu voir au colloque, issues de limagination et du travail des mathématiciens mais également fabriquées des mains des artistes, exercent un pouvoir dattraction sur lobservateur. Cest comme si soudain les mathématiques elles-mêmes devenaient tangibles, on peut dun coup dil appréhender ce qui était dans limaginaire. Lobjet mathématique devient objet réel, rempli de toute linformation que lartiste y a déposée. Enrichi par tout le temps accumulé, il peut sinscrire dans la durée.
Avec Manuel Arala Chaves(33), professeur à Porto et membre du comité organisateur du colloque, découvrons le site « atractor »(34) de lUniversité de Lisbonne. On y trouvera en particulier une très belle collection de polyèdres ainsi que des animations sur le ruban de Möbius. À noter également une introduction aux représentations par des modèles réels des surfaces mathématiques complétée par une étude de leur orientation.
Rendre les mathématiques interactives est un des objectifs de lassociation qui gère le site. La réalisation dune exposition itinérante est à létude dans le cadre dun projet européen. Des liens vers dautres sites participant au projet ainsi que vers des musées scientifiques à travers le monde sy trouvent.
Avec les possibilités des multimédias, la tentation de passer dun sujet à un autre sans approfondissement représente un écueil certain ; cependant, ils ouvrent de multiples horizons et permettent daller à la rencontre des artistes et des chercheurs en faisant connaître leurs travaux.
Cest dans cette ouverture nouvelle que lon peut mieux situer le débat de linfluence de lart sur lenseignement des mathématiques.
La réalisation dune uvre dart mobilise tous les talents de lartiste adulte, nen pourrait-il pas être de même pour nos élèves ? Pour aboutir, de nombreux problèmes doivent être résolus et ce nest quavec le temps et de très nombreuses approches successives que lon arrive au bout du chemin. En leur proposant une « uvre » à leur portée, ils pourraient y exprimer de nombreuses potentialités et éprouver la joie que procure sa réalisation tout en faisant fonctionner les mathématiques sous-jacentes.
En somme, les arts ne pourraient-ils pas devenir facteur déclencheur de lapprentissage en suscitant lactivité réelle de lélève au sens où la décrite Piaget ?
Assemblage de six motifs élémentaires pour un modèle visible(35) à lAlhambra.
3. Quelques approches en classes de collège
Depuis de nombreuses années, depuis ma rencontre avec Bernard Morin(36), je fais réaliser par mes élèves, parallèlement aux cours habituels, des dessins géométriques qui illustrent telle ou telle propriété. Elles sont en grandes parties tirées des tomes 1 à 4 de louvrage « La géométrie pour le plaisir » de Lysiane et Jocelyne Denière [6]. Laspect esthétique de la géométrie peut se révéler être source de motivation : des élèves en difficulté simpliquent dans leurs productions.
Repris par mes collègues professeurs de mathématiques de la Providence-Nord et grâce aux conseils des professeurs darts plastiques, ces travaux donnent chaque année de belles réalisations.
Certains élèves montrent très rapidement de réelles capacités. Pour la plupart, les progrès viennent avec le temps. L'intérêt de ces élèves grandit d'années en années. C'est avec un réel plaisir qu'ils demandent à faire de nouveaux dessins.
Le pouvoir dattraction des figures est ressenti par les enfants, naturellement ils dessinent des rosaces. Une attitude de recherche peut être provoquée par la découverte dune construction qui ne leur est pas familière.
Cest le cas de la rosace ci-contre, extraite du bulletin APMEP n° 371[7], elle a eu un certain succès dans une classe de 6ème malgré la grande hétérogénéité des élèves alors que dautres essais préliminaires furent moins bien réussis.Bien que turbulents par ailleurs, certains élèves ont montré une rapidité et une qualité dexécution remarquable. Il a ainsi été possible de mettre en place un vocabulaire de géométrie élémentaire ainsi que, après plusieurs semaines, la rédaction du programme de la construction.
Les tracés de courbes point par point et par tangentes permettent également de belles réalisations.
Au cours de lannée scolaire précédente javais retenu, en classe de 6ème, le thème des courbes mathématiques. Inspiré des travaux de lIrem de Strasbourg [8] et de la brochure de présentation des nouveaux programmes [9], ce travail sest révélé fructueux.
Il montre quavec le simple matériel de géométrie habituel, il est possible damener de très jeunes élèves à exécuter des tracés très précis. Ils se familiarisent ainsi avec des courbes dont létude se prolonge jusquà luniversité.
Les exemples sont classiques comme la cardioïde, lastroïde et la rosace à quatre branches, lovale, lellipse, la parabole, mais aussi la cissoïde, la strophoïde droite, la cubique dAgnesi [10] et la cubique anguinea voire la trisectrice de Mac-Laurin ou la spirale de Théodore de Cyrène [11].
Spirale de Théodore de Cyrène et rosace à quatre branches
Il me revient à lesprit le cas dun élève qui savait à peine manipuler léquerre en début dannée et qui de semaines en semaines a fait de beaux progrès ; mais dautres également qui ont très rapidement fait preuve dexcellentes qualités graphiques.
La répétition dun même geste est ici un élément essentiel, il favorise lacquisition des représentations internes des concepts.
On trouvera sur le site de Jean-Paul Quelen(37), professeur au lycée Jean Monnet de Strasbourg, des animations de quelques-unes de ces courbes ainsi que bien dautres thèmes mathématiques.
Construction : quand le point M décrit la droite (D) le point P décrit la cubique dAgnesi.
Les pavages [12] offrent en 5ème des approches intéressantes. Après avoir expliqué le motif de base indiqué précédemment, il nest pas très difficile de passer au plan entier à laide du pavage triangulaire pour obtenir le dessin ci-dessous qui peut être colorié selon les goûts de chacun :
Pavage(38) réalisé par les élèves de 5èmes.
On prépare ainsi l'apprentissage des transformations géométriques ; lutilisation du papier calque est très utile dans cette démarche car elle permet de mettre en évidence, en agissant, quune symétrie centrale correspond à une rotation dun demi-tour. Certains élèves observent que si lon enchaîne deux symétries centrales le motif est simplement décalé.
Il a été possible d'aller plus loin à partir d'un retour sur l'étude de la symétrie axiale vue en 6e. En prenant comme point de départ le pavage « des petits chinois dEscher(39)» ([2] ou [13]), il a été envisageable dintroduire la technique de lenveloppe. Après un temps de maturation certain et une utilisation intensive du papier calque, les élèves ont pu créer leur propre pavage.
La démarche est semblable à celle suivie par des élèves de cinquième au cours dun parcours diversifié(40) au collège Marcel Pagnol de Vernouillet dans lacadémie dOrléans-Tours.
Certaines réalisations furent particulièrement remarquables, et témoignent de réels talents. Les conseils des professeurs darts plastiques constituent à ce niveau davancement une aide précieuse pour les élèves qui peuvent ainsi mettre en uvre toutes les ressources de leur imagination. De jour en jour, mais plutôt de semaine en semaine on voit poindre des améliorations dans les tracés et la finition mais également dans la création des modèles dont certains sont devenus très élaborés.
Par la suite, en 4ème et 3ème létude des translations et lintroduction des vecteurs sera grandement facilitée.
Les règles de la perspective cavalière peuvent être expliquées dès les premières années du collège et initient les élèves aux représentations spatiales. Le fichier « Pratiquer la géométrie. » [14] de lIrem de Lorraine est apprécié depuis de nombreuses années par les élèves et les professeurs de notre établissement. Il favorise le travail indépendant introduit agréablement la géométrie dans lespace.
Un travail qui a été motivant en début de 5ème a consisté à fabriquer un prisme droit à base hexagonale en papier blanc puis de faire réaliser, en perspective cavalière, le dessin dun assemblage de plusieurs de ces prismes droits ayant des hauteurs différentes.
Au cours du colloque Dick Termes(41) [15] a expliqué comment représenter sur une sphère la globalité de ce que voit un observateur placé en un lieu donné en regardant dans toutes les directions ; il utilise ainsi une perspective avec six points de fuite ! Un exemple typique est la représentation de lintérieur de la Sainte-Chapelle à Paris ou celle de la basilique Saint-Pierre à Rome.
Au collège des dessins avec un ou deux points de fuite sont possibles et permettent un parallèle fructueux avec les cours darts plastiques. Pour aller plus loin, Nicole Vogel(42), professeur au LEGT de Haguenau, propose sur son site quelques belles balades mathématiques, des excursions animées dans lespace et une initiation au dessin en perspective.
Une initiation aux représentations en perspective cavalière du cube s'est avérée fructueuse en prenant comme point de départ louvrage « Dessiner lespace » de Michel Rousselet [16]. Il a été ainsi possible dintroduire les règles de dessin à respecter et de préparer une utilisation future des logiciels de dessin. En prolongement, on pourra envisager de représenter quelques troncatures du cube ainsi que des polyèdres(43) comme le tétraèdre régulier, loctaèdre régulier ou le cuboctaèdre.
Prisme droit à base hexagonale et octaèdre régulier inscrit dans un cube
En fin d'année, la participation à l'Exposcience Alsace 2001 a suscité d'autres développements. L'assemblage de polyèdres à l'aide de tiges et de noeuds a permis de fabriquer les cinq polyèdres réguliers de Platon, quelques polyèdres semi-réguliers et les cinq polyèdres du mathématicien russe Fedorov qui permettent de paver l'espace(44). Une allusion à la cristallographie(45) à ainsi pu être faite. Ces polyèdres sont le cube (pyrite),le prisme droit à base hexagonale (orgues basaltiques), l'octaèdre tronqué encore appelé "polyèdre de Lord Kelvin", le dodécaèdre allongé et le dodécaèdre rhombique (grenat).
Polyèdre de Lord Kelvin et dodécaèdre rhombique
Ainsi, il a été possible de poser en introduction la question suivante,qui renvoyait également à d'autres stands.
"Comment la Nature remplit-elle l'espace, avec quels objets, pourquoi ?"
Ces quelques exemples, tirés de la pratique quotidienne sont autant de tentatives pour présenter la géométrie de façon attrayante à travers des activités qui visent la construction progressive des connaissances. Les aboutissements sont de « petits chefs-duvre » exposables comme ceux de lartiste adulte.
Remerciements :
Ce travail n'aurait pas pu être mené à son achèvement sans la participation active des élèves, d'anciens élèves, de collègues qui se sont spontanément associés au projet initial, et de parents d'élèves qui ont accepté d'assurer quelques contraintes matérielles. Je les en remercie vivement.
4. Conclusion
Le colloque ouvre de nombreuses voies, chacun pourra les parcourir à sa guise, y trouver maintes sources de curiosité, denrichissement et dapprofondissement. On peut sans doute y découvrir des voies d'exploration utiles à la mise en place des itinéraires de découverte dans les collèges, et des sujets d'étude pour les travaux personnalisés encadrés (TPE)(46).
Une uvre dart, la résolution dun problème, sont de longs cheminements, des aboutissements. Artistes et chercheurs sont des personnes entièrement engagées dans le courant qui les porte vers laccomplissement de leur ouvrage. Ils font confiance en leur expérience propre et en lévaluation interne du travail quils sont en train de réaliser.
Faire en sorte que lélève puisse mener à son terme une uvre personnelle, si petite soit-elle, au contact dun professeur me semble être un complément intéressant aux nouvelles technologies. Cette démarche qui permet le développement de la créativité personnelle tout en exigeant persévérance et ténacité, s'apparente à celle de l'artiste et du chercheur.
Comme la fait remarquer Claude-Paul Bruter, luvre achevée, exposée, crée une stabilité, un équilibre. Lil de lobservateur revient se poser souvent sur elle pour en saisir les plus infimes détails. De même, la main du sculpteur, celle du géomètre, du mathématicien aveugle, perçoit les moindres variations de la courbure de la surface quelle effleure.
Des pyramides dEgypte à la pyramide du Louvre(47), de lart rupestre aux plus belles images fractales, Arts et Mathématiques marquent leur temps et sont les témoins de lingéniosité des hommes qui les ont fait naître. Puissent-ils être des exemples pour nos élèves en les incitant à développer le goût du beau et de la recherche(48).
Bibliographie :
Mathematics and Art, Actes du Colloque de Maubeuge, C.P.Bruter ed.,Springer -Verlag, Berlin, 2002 (volume de la série Mathematics and Visualisation)
Cet article à fait l'objet d'une publication voisine dans le numéro 103 de la revue L'Ouvert de l'Irem de Strasbourg(49) et dans le numéro 436 du bulletin de l'APMEP.
[1] Bulletins n°430 et n° 431 de lAPMEP.
[2] Activités
mathématiques en classe de quatrième-troisième, tome II.
Brochure Apmep n°38. p 79 à 115.
[3] Théorie des nuds
et enluminures celtes. Christian Mercat.
LOuvert n° 84. p 1 à 22.
[4] Michèle et André ARSENE : Jean Piaget et les mathématiques au collège. IREM de Reims, Moulin de la Housse, 51100 REIMS.
[5] Faut-il brûler Piaget ? David Cohen. RETZ. Paris.
[6]La géométrie pour le plaisir. Tome 1 à 4. Editions KIM, 26, rue Jules-Degroote, 59 240 Dunkerque.
[7] Bulletin APMEP n°371. p659 à 670. Géométrie, une approche par le dessin géométrique cm2-6ème. Yves Ducel, Marie-Lise Peltier.
[8] Activités géométriques de la sixième à la terminale. IREM de Strasbourg
[9] Mathématiques en classe de Sixième. La mise en uvre des programmes de 96. Fascicule 2. Académie de Strasbourg.
[10] LOuvert n°96, p 47 à 50
[11] Les spirales, André Stoll, LOuvert n°96 p 1 à 13 et n°97 p 1 à 15.
[12] Le secret des pavages RAOUL RABA, Editions du PLOT.
[13] Maths en scène. Brochure APMEP n° 121.
[14] Pratiquer la Géométrie. Classe de 6éme et classe de 5ème. Fichier de lIrem de Lorraine. Belin.
[15] New perspective système, seing the total picture, one through six point perspective by Dick A.Termes. (605) 642-4805, Route 2 Box 435 B, Spearfish, SD 57783, USA.
[16] Dessiner Lespace ou Comment employer Cabri-Géomètre dans lespace, Michel Rousselet. Editions Archimède.
ARPAM : Association pour la Réalisation et la Gestion du Parc de Promenade et d'Activités Mathématiques.
Les figures de cet article sont faites avec le logiciel gratuit Déclic(50).
Lien supplémentaire
proposé par Emmanuel Ostenne concepteur du logiciel Déclic :
sur http://lilimath.free.fr il y a un lien vers GeoLap en Java
:représentation de patrons, de solides et pliage/dépliage de
patrons en langage Logo.
Et pour terminer, voici deux derniers liens suggérés par François Pluvinage vers des sites où l'on découvrira des dissections géométriques de polygones réalisés dans le cadre du projet CabriJava.
http://www.cabri.net/abracadabri/Coniques/Panoplie/Dissect/dissectG.htm
http://www.cs.purdue.edu/homes/gnf/book/webdiss.html
Adresses Internet :
* http://www.archipress.org/press/atlas.htm
** http://arpam.free.fr/bruter.html
*** http://arpam.free.fr/
(1) http://arpam.free.fr/colloque.html
(2) http://www.bradshawfoundation.com
(3) http://www.zib.de/vgp//
(4) http://www.popmath.org.uk/sculpture/sculpture.html
(5) http://www.georgehart.com/index.html
(6) http://www.popmath.org.uk/centre/index.html
(7) http://www.unice.fr/LEML/coursJDV/morpho/morpho3-2.htm
(8) http://www-sfb288.math.tu-berlin.de/~konrad/booklet/intro.html
(9) http://www-sfb288.math.tu-berlin.de/~konrad/video.html
(10) http://arpam.free.fr/friedman.html
(13) http://nothung.math.uh.edu/~mike/
(14) http://tecfa.unige.ch/tecfa/teaching/UVLibre/9900/bin08/welcome.htm
(15) http://www.maa.org/reviews/twovideos.html
(16) http://www.vivagranada.com/fr/index.htm
(17) http://weasel.cnrs.humboldt.edu/~spain/gran/index.htm
(18) http://arpam.free.fr/dedo.html
(19) http://specchi.mat.unimi.it/
(20)http://irem.u-strasbg.fr/irem/site00-01/annee2000/depliant/Mathuvu.html
(21) http://new.math.uiuc.edu/optiverse
(22) http://www.math.uiuc.edu/~jms/Papers/isama/color/
(23) http://arpam.free.fr/charbonneau.html
(24) http://arpam.free.fr/apery.htm
(25) http://publimath.irem.univ-mrs.fr/bibliocomp/IST99010.htm
(26) http://publimath.irem.univ-mrs.fr/bibliocomp/IST99003.htm
(27) http://www.math.uiuc.edu/~jms/Photos/MathArt/Maubeuge/
(28) http://new.math.uiuc.edu/five
(29) http://arpam.free.fr/jeener.html
(30) http://www.lactamme.polytechnique.fr
(31) http://www.apmep.asso.fr/
(32) http://www.xahlee.org/SpecialPlaneCurves_dir/specialPlaneCurves.html
(33) http://arpam.free.fr/chavesforum.htm
(34) http://www.fc.up.pt/atractor
(35) http://weasel.cnrs.humboldt.edu/~spain/gran/other/image1.gif
(36) http://www.math.uiuc.edu/~jms/Photos/MathArt/Maubeuge/dickson-morin/
(37) http://perso.wanadoo.fr/jpq/
(38) http://www.vivagranada.com/images/alhambrabath1.jpg
(39) http://www.worldofescher.com/gallery/
(40) http://etab.ac-orleans-tours.fr/clg-mpagnol-vernouillet/Les%20pavages.htm
(41) http://arpam.free.fr/termes.html
(42) http://perso.wanadoo.fr/nvogel/index.html
(43) http://www.ac-noumea.nc/maths/amc/polyhedr/index.htm
(44) http://semsci.u-strasbg.fr/pavagede.htm
(45) http://serge.mehl.free.fr/anx/cristaux.html
(46) http://www.eduscol.education.fr/tpe/default.htm
(48) http://www.palais-decouverte.fr/
(49) http://irem.u-strasbg.fr/
(50) http://home.nordnet.fr/~eostenne/declic.htm